Ils vont à sa rencontre..mais ils restent à la distance réglementaire prévue par la loi, alors ils crient!
Ils crient pour être entendus par delà cette marge qui les séparent du monde. Ils sentent tellement que Lui est différent de ceux qui les ont rejetés, de ceux qui les obligent à vivre en petits groupes isolés, loin des autres, complètement exclus. Ils sentent tellement que Lui les entendra, que Lui leur répondra.
“Prends pitié de nous !” Car il faut crier pour être entendu quand on est éloigné. Il faut même, parfois, braver les tabous et les interdits, pour avoir une chance, si minime soit-elle, d’être reconnu, d’être pris en compte. Le monde est tellement occupé, il fait tellement de bruit qu’il faut crier très fort pour dire que l’on existe.
“Prends pitié de nous !”
Je pense à tous ceux et celles que j’ai rencontré , accompagné, à l’occasion de mon ministère de diacre: personnes handicapées, physiques ou psychiques, malades mentaux et leur famille. J’entends encore ces appels, ces cris de souffrance et parfois de révolte..
“Personne ne m’aime” hurlait Béatrice en arrivant le matin au C.A.T. – toute petite Béatrice a été rejeté par sa mère et elle a galéré de foyers en institutions spécialisées- avec les cris, venait la violence, parfois même physique, puis les larmes coulaient….“Si, Jésus m’aime”. Et puis ce fut ce froid matin de Janvier où elle a enjambé le balcon du 2° étage. Béatrice ne crie plus.
Je pense aux parents de ce garçon, brillant étudiant, qui, tout à coup, a basculé dans la schizophrénie et qui rendait son père responsable de sa maladie, menaçant de le tuer et de se tuer ensuite.
Je pense à ces femmes complètement déstructurées, démolies, par un père incestueux et violeur.
Appels angoissés, cris de souffrance, cris de révolte poussés par delà leur marginalité.
“Prends pitié de nous !”
Mais je pense aussi à tous ces moniteurs/trices éducateurs/trices, infirmières, infirmiers, médecins, et parents qui patiemment, obstinément, avec amour même, ont donné tout ce qu’ils avaient, ont donné de leurs tripes, pour écouter, accueillir, accompagner, soigner ; pour aider ceux qui criaient depuis leur marginalité, à prendre leur place dans la société, à vivre, le plus possible, avec et au milieu des autres.
Alors…….
Mission? Actes des Apôtres? Peut-être ..Mais je crois que oui, car “Jésus, le Maître” a voulu que ce soit nous, qui Lui transmettions ces cris.