J’ai été amené à commenter, dans l’homélie d’un dimanche récent, le texte de Marc (6, 1-6) qui évoque les frères et sœurs de Jésus. En cette période de Da Vinci Code, il me semblait important d’hasarder un commentaire. Je me suis lancé en disant que, dans beaucoup de pays d’Afrique et du Moyen-Orient, à Madagascar en particulier, le terme de frère désignait aussi bien les frères que les cousins, que les mots de l’évangile n’impliquaient pas obligatoirement l’existence de frères et sœurs au sens où nous l’entendons aujourd’hui. J’ai ajouté que Jésus était donc « probablement fils unique ».
À la fin de la messe, comme c’est souvent le cas, deux personnes sont venues me dire quelques mots.
La première m’a remercié pour mon ouverture d’esprit, elle m’a dit qu’il était très important pour elle de laisser la question ouverte. Le « probablement » était le bienvenu parce qu’il laissait la place à la foi sans trancher définitivement une question dont la réponse n’est pas de l’ordre de la certitude démontrable.
Le deuxième est venu me reprocher mon « probablement » : alors que je disais regretter les manques de repères actuels, en particulier chez les jeunes, j’ajoutais à la confusion par le vague de mes propos. Il aurait fallu que je sois plus ferme dans mes affirmations, que je m’appuie plus résolument sur les dogmes de l’église. Il a rajouté qu’il appréciait d’habitude le contenu de mes homélies…
La troisième réaction est venue un peu après, de la part d’un pratiquant régulier. Lui s’est étonné, gentiment, de la radicalité de mes propos. Il trouvait étrange que j’affirme aussi fortement et sans preuve que Jésus n’avait pas eu de frères et sœurs biologiques. Il a rajouté que pour lui ce n’était pas l’essentiel du message de l’évangile.
Je ne suis pas le maître de la Parole, pas même de la mienne. Elle fait son chemin dans la tête et dans le cœur des gens, au gré de mes a priori et des leurs, de leurs attentes et des miennes. Il arrive que j’aie des retours, mais comment savoir l’impact des célébrations chez ceux qui sont devant moi ? Je ne suis pas le semeur, du moins ce n’est pas moi qui fais pousser, j’espère seulement ne pas trop faire écran.