
Je n’avais guère plus de 14 ans que déjà je ne manquais pas de piété… J’aimais bien aller à la messe en semaine à la paroisse saint Paul. Il y avait toujours, au cours de ces cérémonies, un prêtre à l’écart, dans le confessionnal, prêt à recevoir les pénitents. Il semble que cette mode étrange revienne dans certaines paroisses et qu’à nouveau, des prêtres proposent de recevoir les pécheurs au cours des messes de semaine…sans compter les incitations actuelles, sans cesse renouvelées, à passer par la case confession.
Même à l’époque et malgré mon jeune âge, j’étais choqué de voir que plus de la moitié des femmes (aucun homme n’était de la partie !) sortaient du confessionnal en pleurs au lieu de rayonner de la joie d’être pardonnées. Quelle entreprise de culpabilisation ! Qu’est-ce qu’elles devaient entendre ! Quel pouvoir clérical !
J’ai persévéré dans mon désir de devenir prêtre tout en me disant que ce ne serait pas pour faire pleurer les gens mais pour les faire entrer dans la joie d’être sauvé.
Je trouve que, malheureusement, il est à nouveau très souvent question des péchés dans nos églises. Que le Mal soit omniprésent dans notre monde est une évidence et demander au Père de nous en libérer et de nous aider à nous en détourner ne manque pas de pertinence. Mais je regrette quand notre prière passe de la référence « au péché » du monde à l’évocation « des péchés » : de nos péchés personnels. C’est changer de niveau en ramenant l’horreur du Mal à la mesquinerie de nos manquements quotidiens. Il est certes important de lutter contre nos dérives personnelles afin d’être plus efficaces dans notre combat contre ce qui démolit notre monde mais croire que cela sera suffisant est une dangereuse illusion. Le chantier est bien plus vaste et ne saurait se limiter à une morale individuelle.
Dans mon questionnement sur ce que je ressens des dérives culpabilisatrices actuelles, je préfère en rester là, je manque trop d’objectivité. Je voudrais juste rajouter que, tant qu’à réformer la traduction du « Notre Père », on aurait pu changer le « pardonne-nous nos offenses » et revenir au « remets-nous nos dettes comme nous les remettons… ». Passer des offenses aux dettes serait se mettre en conformité avec l’original grec et latin et serait bien plus concret !
En attendant, on peut toujours se confesser si on en sort renouvelés et si ce n’est pas une manière de remettre notre destin entre les mains de quelques clercs.